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Posté(e)

Bonjour,

 

Trop drôle......

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Il nous arrive tous d’être débordés.

C’est ainsi ; roi ou mendiant, nos journées ne peuvent faire plus de 24 heures, et lorsque les activités commencent à se cumuler et l’emploi du temps à se remplir, il devient difficile de prendre en charge de nouvelles missions. Dès lors, on dit être “débordé“, réponse ultime faite à celle et ceux qui demandent s’il ne vous resterait pas un peu de temps, tels des punks à chiens vous demandant si vous n’auriez pas une petite pièce qui traîne devant Carrefour-Market, et à qui vous répondez avoir déjà tout donné.

Pourtant, ce qui n’est qu’un état passager chez l’être humain est pour certain un art de vivre ; mi-homme mi-agenda raturé, ces créatures de l’ombre rôdent sur nos lieux de travail, en quête d’une proie à qui expliquer qu’ils n’ont pas une minute de répit. Ces créatures échappées de l’enfer, ces monstres que l’on cache aux enfants sont pourtant parmi nous quotidiennement. Et vous en connaissez : pour parler d’eux, nous utiliserons donc le terme générique de “débordés“.

 

L’enfance du débordé : genèse d’un trou du cul

 

Souvenez-vous, déjà, bien avant le monde du travail : ces petits matins à patienter devant la porte d’une salle d’examens dans laquelle vous alliez passer quelque contrôle ; alors que vous discutiez tranquillement avec vos petits camarades, les yeux encore embués par le sommeil, il (nous dirons “il“, mais cela peut être “elle“) débarquait d’un pas rapide en ouvrant des yeux ronds, attrapant le premier comparse à sa portée pour commencer sa longue litanie : “Haaan, j’ai trop pas eu le temps de réviser, ya trop de trucs“, “Je vais jamais y arriver !“, “C’est trop dur ce cours !“, avant de poser des questions à l’assemblée du genre “C’était en quelle année déjà tel évènement ?” ou “T’as réussi à tout apprendre toi ?“. Le débordé n’a jamais vraiment été humain : il n’est qu’une allégorie du stress incarnée sur Terre pour tenter de transmettre son mal à un maximum de personne. C’est une sorte de MST, avec un S pour social.

 

Le débordé a toujours eu cette petite voix et ce rire nerveux qui annoncent l’effondrement de vos barrières mentales, trompettes de Jéricho nerveuses vous donnant quasi-instantanément l’envie d’enfoncer votre poing très fort dans sa bouche sitôt que cette dernière commence à s’ouvrir. C’est pourquoi, vous vous en souvenez, lorsqu’enfin quelqu’un trouvait la force de l’envoyer chier afin de restaurer le calme matinal d’un couloir d’établissement scolaire, il s’empressait de s’asseoir au sol pour sortir de son sac des “fiches de révisions“, plus connues sous le nom de “mon cours complet écrit en plus petit” pour les érudits. On ne l’entendait alors guère plus, si ce n’est marmonnant ici ou là tel un adorateur de Satan (ou de Justin Bieber), ou trouvant la force de poser une énième question à une personne à proximité pour confirmer ce qu’il lisait dans ses fiches (de préférence, une question ultra-précise visant à laisser entendre à l’auditoire, ignorant la réponse, que personne n’avait suffisamment révisé). Si le débordé est une débordée, les fiches sont alors couvertes de petits coups de fluo multicolores. C’est trop kikinou.

 

Mais déjà, sa puissance ne s’en arrêtait pas à si peu : même en plein contrôle, alors qu’il lui était interdit de vous adresser la parole, et que vous vous affairiez à tenter de répondre à la question “La première guerre mondiale : une guerre totale ?” (votre réponse impliquant des points Total et des mugs à l’effigie de Clémenceau fut injustement méprisée), il continuait de marmonner dans son coin tout en s’exclamant de temps à autres “Monsieur ! Je peux avoir une autre feuille s’il-vous plaît ?“, mettant ainsi la pression à tout le reste de l’assemblée qui se demandait bien ce que ce petit enfoiré pouvait mettre dans sa copie pour avoir besoin d’autant de place. En général, vous pouviez échapper au débordé en vous barrant avant la fin de l’épreuve : même si celle-ci durait 4 heures, il restait jusqu’à la dernière minute et même plus, suppliant qu’on le laisse “terminer sa conclusion, juste une dernière phrase“. Hélas, sa dernière phrase n’est que trop rarement “Adieu, je vais me pendre“, malgré vos régulières et légitimes prières. Il n’y avait guère qu’en sport que le débordé ne faisait pas de zèle.

 

Souvenez-vous du petit enfoiré qui demandait 20 brouillons en 1 heure

Ainsi a toujours été la vie du débordé : stresser autrui, courir après le temps et geindre comme un pédéraste privé de Queen.

Mais aujourd’hui, le débordé a bien grandi : désormais, il a un travail. Du coup, il a toutes les chances de se retrouver dans la même boîte que vous : c’est là que l’enfer commence véritablement.

 

Le débordé en entreprise ou le théorème de l’anti-productivisme

 

Il est aisé de reconnaître le débordé, puisqu’il a toujours l’air nerveux : il marche vite et mal, fait des gestes rapides et maladroits, à la pause clope, il fume sa cigarette en tirant dessus au point de pouvoir se la faire en deux coups seulement, et son aura de stress est telle qu’il fait pourrir les plantes vertes dans un rayon de 5 mètres autour de lui. De fait, on trouve peu de débordés à Jardiland. Le hobby du débordé consiste à faire le tour des collègues pour aller leur expliquer, tour à tour, que merde, il a trop de boulot, il est débordé quoi, misère, il peut pas avancer ses dossiers tellement il a de missions en cours. Tout le monde s’en fout et attend avec impatience qu’il soit hors de vue pour s’exclamer “Raaah, mais quel gros con“, mais chaque jour le manège reprend. S’il ne se plaint pas, le débordé ne va pas bien ; et s’il ne va pas bien, il se plaint : le bougre est donc l’une des premières forme de mouvement perpétuel à induction paradoxale, ce qui, je l’espère, sera prétexte à transformer ces derniers en carburant dans les décennies à venir.

 

En général, sur 1 heure de travail, il faut considérer que le débordé se plaint pendant 15 minutes, panique pendant 15 autres, tente de s’organiser durant encore un quart d’heure et consacre ce qu’il reste à du travail vaguement constructif. Je dis bien vaguement car le débordé a un incroyable pouvoir : même les moments où il travaille vraiment sont utilisés d’une manière qui laisse dubitatif ; en effet, ce bougre de corniaud est incapable d’être efficace et s’auto-alimente en travail inutile :

• si vous lui confiez un dossier de 10 pages à synthétiser, il vous en rend 12

• s’il vous demande quelque chose par mail, il vous appelle dans l’heure qui suit pour vous demander si vous avez bien reçu son courriel, puis éventuellement vous faxe la même chose avant de vous rappeler pour vous signifier qu’il vous a envoyé un fax

• si vous lui transmettez un dossier déjà complet à 90% réalisé par un collègue, il recommence tout de zéro car “il ne peut pas travailler avec le boulot d’autrui“. A noter que le débordé se débrouille toujours pour atterrir dans une structure où il doit bosser avec une équipe : sinon, auprès de qui irait il pleurer ?

• si vous lui donnez une note à taper, il vient vous voir pour vous demander s’il doit souligner les titres, puis après que vous lui avez répondu quelque phrase impliquant des relations incestueuses avec sa mère, il revient une demi-heure plus tard demander s’il peut mettre des couleurs, et si oui, lesquelles ? Bien que son sang soit la seule couleur que vous aimeriez voir étalée partout dans son bureau, il n’hésite pas à insister.

 

Travailler avec un débordé revient à avoir un gamin de 5 ans dans les pattes, les chances de le voir disparaître avec un kidnappeur en moins : on peut pas l’occuper plus de 5 minutes avec quelque chose sans qu’il n’aille emmerder quelqu’un ; tout le monde a donc cette envie constante de lui mettre une torgnole pour le renvoyer derrière son bureau et le faire bosser un peu, ce qu’il ne comprendra pas car le débordé n’a pas l’impression d’être improductif, bien au contraire : passant ses journées à stresser au boulot, il est persuadé d’être à fond dans son emploi. Et désireux de toujours bien faire, il finit toujours par dépasser les consignes qui lui sont dictées, et donc fait mal.

 

Débordé, incompétence & autres applications pratiques

 

Le débordé est par ailleurs automatiquement incompétent et tient à le faire savoir à tout un chacun. Qu’importe son domaine de spécialité, vous finissez toujours par disserter avec vos collègues sur la manière dont il a pu obtenir son diplôme : l’a t-il acheté ? A t-il triché ? Lors de l’oral de fin d’études, est-ce que l’examinateur a pu comprendre que ses clignements d’yeux répétitifs signifiaient “pipe” en morse ? Aucune explication rationnelle ne semble pouvoir mettre un terme à vos interrogations. Alors qu’à titre d’exemple :

• s’il est communicant ou publicitaire, ses documents sont invariablement illisibles et bourrés de fautes

• s’il est expert web, il finit toujours par vouloir retoucher le site qu’un autre a fait et par le planter

• s’il est “community manager“, non seulement il a la diplomatie d’une palourde, mais accessoirement, il n’arrive même pas à gérer sa propre insertion dans le monde réel

• s’il est expert en développement durable, il imprime tous ses powerpoints (une copie par participant aux réunions), envoie des courriers en plus de ses mails, n’éteint jamais son ordinateur et peut réimprimer 8 fois le même document de brouillon parce que la couleur a merdé là ou qu’il avait oublié une faute ici

Cependant, le débordé a toujours l’impression d’être foutrement compétent : il lui suffit d’assister à une conférence sur un thème lié à son boulot (car son boulot, c’est sa vie et il veut toujours être au top) ou de lire un article du même type pour venir rebattre les oreilles de tout le monde avec. Lorsqu’il parle de son sujet, il en parle toujours d’une manière totalement décalée avec la réalité : s’il s’adresse à des néophytes, il part instantanément dans des détails techniques (qu’il ne maîtrise lui même pas) sans intérêt et les perd au bout de 25 secondes ; à l’inverse, face à un public de vieux briscards, il parle comme s’il s’adressait à des enfants de 5 ans et enfonce des portes ouvertes (tout en réussissant l’exploit, malgré la simplicité de son propos, à se perdre tout seul).

 

Parfois, l’incompétence crasse du débordé finit, par miracle, par atteindre la hiérarchie (pour peu qu’il n’ait pas eu son boulot au piston), auquel cas il est gentiment recadré, ce qu’il vit très mal : lui qui fait tout pour bien faire et qui bosse bien plus que les autres ! Pourquoi lui fait-on des remarques ? Le débordé ne comprend jamais que ses résultats sont moindres, et que si sur 8h de boulot, il n’en passait pas 6h à pleurer et/ou à faire des tâches inutiles qu’il s’auto-impose, il serait diablement meilleur. Alors, ne voulant pas être viré, il tente d’en faire encore plus, et de faire encore mieux : de fait, il devient proche du niveau 0 de la productivité, et reçoit un coup de pied au cul.

C’est à peu près à ce moment là qu’on ouvre le champagne, en général.

 

Que faire face à un débordé ?

 

Un débordé entre dans mon bureau pour me demander si je ne peux pas lui transmettre un document. Dois-je ?

Jamais ; d’abord, demandez-lui dans quel but il souhaite ce document : il est quasiment certain que ça lui sera parfaitement inutile, et qu’il s’en rendrait compte seul s’il avait un ersatz de sens pratique ou d’autonomie. Il se mettra à geindre comme il se doit, mais ne cédez pas à ses caprices : même s’il se roule par terre ou retient sa respiration, laissez le crever.

 

Je suis en train d’assister à une conférence où un débordé prend son public pour des débiles mentaux ou des fans de Lorie, j’hésite encore : dois-je l’enfoncer publiquement ?

Oui. Bien qu’il ne comprendra pas votre remarque (il est persuadé d’avoir fait du bon travail/fera encore plus mauvais la prochaine fois en voulant bien faire) et restera profondément incompétent, c’est un peu comme faire du moto-ball à côté d’un yorkshire jappant : ce serait un crime de ne pas lui mettre un bon coup de latte en passant.

Un débordé sexuellement compatible (d’après ses critères, les miens, moins) n’a de cesse de venir me harceler dans mon bureau : que faire ?

Rassurez-vous : le débordé n’a pas de sentiments : il a bien trop de boulot pour cela ; d’ailleurs, peut-être vaut il mieux pour lui, sinon il réaliserait à quel point il est rejeté par l’ensemble de ses collègues (encore une fois, ça non plus le débordé ne le remarque jamais, trop stressé par son travail pour s’arrêter à ces détails). Non, là ce sont simplement ses hormones qui parlent, ou bien le fait qu’un jour, une fois, vous avez eu un geste amical à son égard (comme ne pas lui péter la gueule en le croisant), et qu’il est donc persuadé qu’il a une chance de pouvoir s’accoupler avec vous. Pas d’inquiétude : un vétérinaire peut le castrer à peu de frais. N’hésitez pas à vous cotiser avec le reste du personnel : après tout, personne n’a envie de le voir se reproduire.

Je suis en réunion et comme d’habitude, le débordé fait son fayot. Comment me tirer de ce mauvais pas ?

Le débordé est le seul être à aimer les réunions, car, tout comme lui, cela consiste à faire un minimum de choses en un maximum de temps, le tout dans un cadre chiant. Aussi, dans ce milieu merveilleux à ses yeux, il n’hésite pas à s’en donner à coeur joie et, toujours plein de bonne volonté, essaie de participer au maximum, principalement pour dire des choses que certains assimilent aisément à de chauds étrons. Profitez de la bonne volonté du personnage pour soumettre l’idée qu’il pourrait être en charge de la mise en application de tout ce qui vient d’être dit : le débordé ne saura refuser, il aime bien trop ça, et ne saura l’appliquer, il est bien trop nul : voilà qui devrait conclure la réunion d’une part et permettre que les idées du débordé ne soient jamais mises en application d’autre part : vous êtes sauvé.

 

Mon patron veut que j’emmène le débordé avec moi en rendez-vous client : est-ce un piège ?

Oui : votre patron a compris que le débordé était naze, et avant de le virer, tente de l’éloigner un maximum de la boîte. Ne pouvant vous dire clairement “débarrassez-moi de ce rebut“, il vous laisse libre de partir en voyage avec : trouvez une aire d’autoroute et attachez-le à un arbre ; peut-être qu’une autre boîte le trouvera et le prendra sous son aile. Ou avec un peu de chances, il sera bouffé par des renards. Qui crèveront probablement d’un ulcère à consommer de la viande stressée. Pauvres bêtes.

 

La tête du débordé vient de passer dans l’encadrement de la porte de mon bureau : il veut me demander quelque chose, je crois.

Fermez la porte d’un coup sec sur sa nuque.

Et vous, comment faites vous avec vos débordés ?

Moi ? Ho, rien d’extraordinaire. Je les prends à part, je leur explique que honnêtement, ils font un boulot formidable : vraiment, tout ce travail qu’ils s’imposent, toute cette auto-discipline à vouloir bien faire… Et je leur susurre qu’avec autant de travail, de compétences et de connaissances, à leur compte, ils seraient déjà riches. Je les aide même à faire leurs papiers pour monter leur boîte.

Quelques mois plus tard, devant Carrefour-Market, je leur dis que je n’ai pas de pièce sur moi : j’ai déjà tout donné.

Et je les regarde retourner caresser leur chien, un vieux bâtard assis dans sa propre urine, à peine absorbée par quelques vieilles fiches de cours couvertes de fluos et de feuilles de brouillons imprimées en 60 exemplaires.

Si je ne leur ai pas donné d’argent, je leur ai donné du temps.

Posté(e)

ben perso, c'est pas pour dire de la ***** mais je suis moi aussi débordé!!

OK je sors

Phil

PS : je suis tellement débordé que je n'ai pas eu le temps de lire tout le rapport!!

Projeteur Revit Indépendant - traitement des eaux/CVC

Posté(e)

Bonsoir,

 

blague à part j'ai lu toute la tirade et le moins que l'on puisse dire c'est que comme toutes les caricatures le trait est exagéré, mais le fond est malheureusement vrai. Les vrais débordés, qui ne se seront pas reconnus dans cette diatribe, ne se plaignent pas ou alors doucement et sont généralement compétents (enfin je pense).

 

Merci pour ce moment de légèreté, même si pour avoir travaillé avec des "débordés" cela n'a pas ravivé que des bons souvenirs.

 

Bonne nuit,

COME

 

La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil. »

Friedrich Nietzsche

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